Usufruit conjoint survivant : attention aux pièges fiscaux !

Le décès d’un conjoint laisse place à une série de démarches patrimoniales complexes, notamment lorsqu’il s’agit d’un usufruit légal portant sur un compte-titres. Une récente décision de la Cour de cassation (27 novembre 2024) éclaire un point souvent mal compris : l’absence de convention de quasi-usufruit peut empêcher la déduction d’une créance de restitution au moment de la seconde succession.

L’usufruit sur les valeurs mobilières : une source de contentieux

Dans l’affaire jugée, Monsieur V., au décès de son épouse, avait opté pour l’usufruit sur l’intégralité de la succession, incluant un portefeuille de valeurs mobilières d’une valeur de 164 303 euros. À son propre décès, ce portefeuille avait été entièrement liquidé, et les titres ne figuraient plus dans son patrimoine. Une créance de restitution a néanmoins été déduite de l’actif successoral par ses enfants, nus-propriétaires des titres.

La position de l’administration fiscale : les comptes-titres ne sont pas des biens consomptibles

L’administration a contesté cette déduction au motif que les valeurs mobilières ne sont pas des biens consomptibles, contrairement à l’argent liquide ou aux denrées (article 587 du Code civil). Selon elle, aucune créance de restitution ne peut être reconnue en l’absence des titres dans la succession, d’autant plus sans preuve formelle comme une convention de quasi-usufruit.

Conséquence : les héritiers ont dû payer les droits de succession sur la totalité de la valeur du portefeuille initial, en plus des pénalités de retard.

La Cour de cassation confirme : pas de créance sans convention formelle

Dans sa décision du 27 novembre 2024, la Cour de cassation valide l’analyse de l’administration. Elle précise que la simple déclaration de succession ne suffit pas à établir la certitude d’une dette de restitution. Seule une convention de quasi-usufruit, rédigée et signée lors de la première succession, aurait pu garantir juridiquement cette créance.

Cette jurisprudence rappelle l’importance :

  • D’encadrer l’usage d’un usufruit sur des titres mobiliers,
  • De formaliser un quasi-usufruit par acte notarié ou écrit entre l’usufruitier et les nus-propriétaires.

Quelles leçons retenir pour la gestion successorale ?

Cette affaire met en lumière une erreur fréquente de planification successorale. En l’absence de convention claire, les héritiers peuvent se voir privés d’un avantage fiscal attendu et contraints de payer des sommes importantes à l’administration.

Points clés à retenir :

  • Les comptes-titres ne sont pas assimilables à des biens consomptibles.
  • L’usufruitier ne peut en disposer librement sans prévoir une compensation formalisée.
  • Une convention de quasi-usufruit est indispensable pour protéger les nus-propriétaires et éviter un redressement fiscal.